La fièvre des séries s’empare du Canada: Rod Palson, le génie derrière le Whiteout se souvient des débuts de cette tradition

WINNIPEG | L’effet est immédiat dès qu’on allume le téléviseur. Cette marée blanche dans les gradins confirme, sans même qu’on ait besoin de jeter un coup d’œil aux uniformes des joueurs sur la patinoire, que les Jets jouent à domicile.
C’est le Whiteout, ou le brouillard blanc, si on veut traduire. Une tradition initiée il y a près de 40 ans et qui a résisté au déménagement des Jets. D’ailleurs, Rod Palson, père du projet, est encore soufflé de savoir que ce qui se voulait un coup de marketing à l’aube des séries de 1987 perdure.
À l’époque, la mission de M. Palson, alors directeur artistique de l’agence Palmer Jarvis Communications, était de trouver une façon de concurrencer la marée rouge des Flames de Calgary, les adversaires du premier tour.
Courtoisie Rod Palson
«Madeline Hanson, de l’équipe marketing des Jets, m’a approché. On a d’abord pensé à demander aux partisans de s’habiller en bleu, en blanc ou en rouge. Mais on trouvait que l’impact serait plutôt mitigé», a raconté M. Palson, joint par Le Journal plus tôt cette semaine.
«Au fil de la discussion, j’ai proposé qu’on leur demande de se présenter à l’aréna vêtus de blanc [à l’époque, les équipes portaient le blanc à domicile]. Tout le monde a un t-shirt blanc ou une casquette blanche dans son garde-robe. Dans le temps, les équipes ne fournissaient pas de chandail ou de serviette comme c’est le cas aujourd’hui, alors ça simplifiait la tâche.»
Réponse instantanée
En revanche, ce qui était moins simple, c’était de prévenir les partisans. En 1987, on était plus près du bouche-à-oreille qu’on ne l’était de Facebook, d’Instagram ou de TikTok. Et le premier match à Winnipeg était prévu une semaine plus tard.
«L’équipe de marketing des Jets a sorti sa baguette magique. Ils ont acheté des pages d’annonces dans les journaux, fait rouler des publicités à la radio. Ils avaient même produit une chanson thématique», s’est souvenu M. Palson.
La réponse fut instantanée ou presque. M. Palson estime que le 11 avril 1987, 80% des spectateurs avaient franchi les tourniquets du Winnipeg Arena vêtus de blanc.
«Le lendemain, pour le match suivant, c’était pratiquement 100%. Je savais qu’une portion de la population allait participer, mais pas autant. C’était phénoménal!»
Les Jets ont remporté cette série en six rencontres avant d’être balayés par les Oilers, éventuels champions de la coupe Stanley.
N’empêche, une tradition était lancée. Jusqu’au déménagement de l’équipe pour Phœnix, à l’été 1996, les matchs de séries des Jets à domicile, c’est en blanc que ça allait se passer.
Le retour des… Polar Bears?
Les Winnipegois ont dû attendre 15 ans avant de retrouver une équipe de la LNH et quatre ans de plus avant de pouvoir assister à des matchs de séries éliminatoires. Malgré une sécheresse de près de deux décennies, il n’était pas question de changer les bonnes habitudes.
Getty Images via AFP
«En plus, les Jets ont failli adopter un autre nom à leur retour. Il y avait des possibilités que ce soit les Polar Bears. Ça ne passait pas dans la population, a indiqué M. Palson. Au repêchage de 2011, quand Mark Chipman [le propriétaire de la concession] a annoncé le premier choix de l’équipe en faisant allusion aux Jets, les gens sont devenus fous de joie.»
«Je savais, à ce moment-là, que le Whiteout allait revivre», a-t-il poursuivi.
Aujourd’hui, le Whiteout, avec son équivalent extérieur, est devenu une machine à imprimer de l’argent. Mais, à l’époque, c’était une façon pour le plus petit marché de la LNH de se démarquer des autres.
«Ça s’est fait naturellement et je suis très fier de ça, a indiqué M. Palson. D’ailleurs, Madeline est décédée du cancer l’an dernier. Ce serait merveilleux si les Jets pouvaient se rendre jusqu’au bout.»
«C’est elle qui a rendu ça possible, a-t-il soutenu. Quand je lui ai proposé l’idée, elle aurait simplement pu dire non.»
Ce serait, effectivement, un sublime hommage.